Président de l’Office de promotion des produits agricoles de Genève (Opage), John Dupraz, viticulteur, ancien député au Grand Conseil, ancien conseiller national et Ecuyer d’Honneur de l’Académie du Cep, s’est fixé comme objectif de faire redécouvrir aux Genevois leurs vins qui, aujourd’hui, se sont hissés au plus haut niveau. Interview.
Qu’en est-il de la qualité de la production viticole genevoise? Les vins AOC Genève ont atteint un niveau de qualité remarquable, auquel on ne rend pas assez hommage. Il suffit pour s’en convaincre de constater l’excellent comportement de nos vins dans les concours auxquels ils participent.
Peut-on en conclure que leur renommée est désormais acquise? Il ne faut pas se complaire dans l’autosatisfaction et rester exigeant quant à la qualité de nos vins. La maintenir très élevée est impératif. Ce serait une erreur énorme de la négliger, sous peine de retomber dans le médiocre et de nuire à la réputation de notre région. Pour cette raison, participer à de nombreux concours, avec succès, est bénéfique, non seulement parce que le vigneron reste ainsi vigilant, mais aussi parce que les récompenses procurent aux vins genevois une notoriété qui leur manque encore trop souvent.
Quel est le cheval de bataille des viticulteurs locaux? Le savoir-faire des vignerons genevois atteint maintenant un niveau remarquable, mais il reste à élever le niveau du «faire savoir», parce que les Genevois ne connaissent pas toujours la qualité des vins locaux. Il faut les leur faire découvrir. La
difficulté réside dans le fait que peu de patrons de cafés sont genevois. En effet, Genève est le canton dont la population est la plus composite de Suisse; il comptait en 2012, 38% de Genevois, 48% d’étrangers et 24% de Suisses.
Les patrons de cafés devraient prendre l’habitude de suggérer les vins genevois en apéritif ou en accompagnement. Nos voisins vaudois et valaisans n’ont pas ce souci de méconnaissance de l’offre du fait que les gérants «de souche» sont plus nombreux, ils ont donc le réflexe de servir les vins de leur terroir.
Comment peut-on assurer la promotion des vins locaux? Les journées portes ouvertes sont utiles à la cause, comme toute manifestation qui met en valeur le vin genevois. Les initiatives que prennent les caves et les bars à vins vont dans le même sens positif. L’action des sociétés bachiques contribue aussi très efficacement à cette promotion.
Existe-t-il un autre moyen d’accroître leur notoriété? Il est indispensable de veiller à la traçabilité en personnalisant nos vins (étiquettes, etc.), tout comme il est vital de préserver et de renforcer le lien entre le terroir, le producteur et le consommateur.
Le dynamisme de la promotion s’accompagne-t-elle de la recherche de nouveaux cépages? L’offre naturelle genevoise reste le Gamay, le Chasselas, le Pinot noir et, dans une moindre mesure, le Gamaret. Mais il est important d’accentuer la diversité et de développer des produits et des vins locaux et d’étendre la palette des cépages sur le terroir genevois.
Comment les vignerons envisagent-ils le marché futur? Les vignes sont plantées pour 40 à 50 ans. Le calcul est le suivant: moins dense à l’hectare, la vigne a une durée de vie plus longue. Comme on ne peut savoir quelles seront les attentes des consommateurs dans 20 ans, il faut nous diversifier autant que possible. Le rosé, qui ne se développe dans le canton que depuis 20 à 25 ans, est un bon exemple. Il illustre notre capacité d’adaptation à l’évolution du goût des consommateurs.